Sirène, si reine
NOTES :
Oui, je peux sortir ça dans les salons mondains de la gauche caviar : « Moi, Monsieur, j’ai travaillé chez Renault, à Flins ! ». En automne 1970. Il fallait que je me lève à cinq heures du matin pour attraper le premier métro pour traverser tout Paris. Pour ne pas louper l’unique car qui partait du Pont de Sévres. C’était le temps où les maoïstes « infiltraient » les masses prolétariennes. Pour les convertir à l’orthodoxie marxiste-léniniste. De véritables missionnaires. Moi j’étais plutôt dans une période zombie. Gueule de bois urbaine après un premier séjour dans le Sud. Et se Soleil des zones industrielles qui osaient encore briller. Provoquer. C’est là bas que j’ai eu l’idée de cette chanson fleuve. Une chanson sur une seule note. (pas de blague ! cette note est déposée à la SACEM, c’est un Si !, ne me la volez pas !).
SIRENE, SI REINE ! (PM-Paris 1970)
LE TEXTE :
Sept heures moins cinq ! sept heures moins cinq !
J’te laisse ma nuit sur le zinc,
Sept heures moins les bouteilles clinquent
Mais c’est avec la pointeuse qu’on trinque
Le sauciflard, la brillantine,
Ca sent déjà un peu l’usine.
Tiens v’l’à Geneviève de Genevilliers,
Albertine d’Aubergenville
Et les fatmas d’outre-banlieue
Qu’ont des noms à la « mord-moi-l’nœud ».
Saintes-Maries pleine de crasse,
Priez pour moi pauvre fraiseur,
J’ai vraiment pas l’cœur au labeur…
Y a pourtant bien des bons copains,
Tra la la !
Au comptoir
Et puis surtout des chouettes nanas,
J’vous prie d’croire !
Et v’l’a-t’y pas not’ grand Seigneur,
Avec son sceptre jambon-beurre
Et ses crayons toutes les couleurs
Et sa cravate à trèfles et cœurs
Chefaillon d’amour,
Roi du calembour,
Un coup de barre peut être un cas de bourre !
Avec sa gueule à la Goya,
Le Yougo nous fait son yoga,
Il a des canards pleins les bras,
Remplis de ragots en charabia,
Les yeux cernés de cyrilliques
Ici on l’nomme « Croate de bique »,
On trouve toujours plus crouillat qu’soi.
Et puis me vlà chevelu de service,
Je rêve au lieu d’tourner les vis,
Je vends mon âme aux puces de Vanves
Pour me payer des cartes oranges
Chienne de vie, voie de garage
Il faut savoir tourner la page…
Soleil des zones industrielles
Qu’est-ce-que tu fais dans le décor,
A venir me nourrir le corps
De rogatons de vieux voyages,
Passent les nuages,
Et pas ces images
Il me faut savoir tourner la page…
Mais qu’est ce que c’est que tous ces trains,
Qui grillent les gares de banlieues,
Qui portent des noms d’Arcs-en-ciel
Aux grilles grasses de mon matin,
Que ces trains déraillent !
Que ces bruits s’en aillent !
Je ne sais plus livrer bataille !
Et voici l’heure de la marée
Du bleu des yeux d’une Marie,
Entre deux machines-outils
Et çà, çà m’lave de mon cambouis,
Ferme donc les yeux !
Ou jette moi la bouée,
Je ne crois pas savoir nager…
Savoir nager…
Savoir nager…